Ils analysent les pots cassés

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N° 310 - Publié le 6 juin 2013
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Des jeunes céramologues ont échangé sur leurs méthodes de travail en contexte archéologique complexe.

L’archéologie est en plein renouveau. En introduction du colloque “Pour ne pas tourner autour du pot ?”, organisé les 17 et 18 mai derniers par de jeunes chercheurs du Laboratoire archéologie et histoire Merlat (Lahm)(1) de l’Université Rennes 2, Mario Denti, le directeur du Lahm rappelait le contexte : « L’archéologie classique s’est construite sur une perception hellénocentrée, partageant arbitrairement et obstinément nos champs de recherches entre, d’une part, ce qui est grec et, d’autre part, ce qui ne l’est pas. » Une analyse qui trouve ses limites quand, sur les chantiers de fouilles, on se trouve dans un contexte mixte.

 

Zone de prédilection de fouilles des chercheurs du Lahm, le site de l’Incoronata, dans le golfe de Tarente au sud de l’Italie, est bien dans ce cas : des céramiques fabriquées par la population qui vivait sur place (indigène) côtoient des pièces grecques. Et il y a aussi des objets mixtes, comme un tesson décoré d’un motif grec retrouvé sur une forme indigène.

Une première lecture de l’histoire voulait que les Grecs aient débarqué au 7e siècle et chassé les indigènes. Cette affirmation devient de plus en plus nuancée, à la lumière de travaux récents, comme ceux présentés par Solenn Briand, François Meadeb et Clément Bellamy pendant le colloque. « Certains produits qui nous paraissent hybrides montrent qu’une cohabitation artisanale a bien eu lieu », affirme François Meadeb.

Les céramologues d’aujourd’hui sont archéologues et potiers ! Leurs observations mêlent l’analyse de la forme de l’objet, de la technique utilisée : tournage, battage, modelage... Sans oublier l’usage qui en était fait. « Pourquoi certaines pâtes grossières avec des inclusions, de tradition indigène, ont-elles perduré après l’arrivée grecque ? Parce qu’elles étaient tout à fait adaptées à la conservation de l’eau au frais », souligne Solenn Briand. « Aujourd’hui on reconnaît mieux ce que l’on peut appeler l’hybridité culturelle », ajoute Clément Bellamy. Si cet te nouvelle approche va dans le sens d’une persistance des indigènes et d’une réévaluation de leur rôle, les chercheurs prennent garde à ne pas tomber dans l’excès inverse en le surestimant.

Ils étaient une trentaine d’étudiants français, italiens, suisses et allemands à échanger sur leurs travaux en Méditerranée occidentale. « Cela devient plus facile aujourd’hui car le monde est plus “mixte” qu’avant et les étudiants déjà “déconstruits” ! », note Mario Denti. Mais le puzzle à reconstruire ne s’en trouve que plus complexe.

Clément Bellamy, clement.bellamy [chez] hotmail.fr (clement[dot]bellamy[at]hotmail[dot]fr)

(1)UMR CNRS 6566, CReAAH - Centre de recherche en archéologie, archéosciences, histoire.

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