À bord d’un bateau virtuel

N° 331 - Publié le 7 mai 2015
© Inria
À la barre de la reconstitution virtuelle du Boullongne, les historiens se mettent dans la peau de marins du 18e siècle.

Magazine

4236 résultat(s) trouvé(s)

La 3D n’est pas réservée au cinéma. Aujourd’hui, les scientifiques peuvent s’immerger dans leur sujet de recherche.

Le vent souffle et la mer se creuse. Sur le pont du Boullongne, navire de la Compagnie des Indes orientales du 18e siècle, le mal de mer n’est pas loin. Ceci n’est pas un extrait d’un journal de bord d’époque, mais l’impression de Sylviane Llinares, spécialiste de l’histoire maritime à l’Université de Bretagne-Sud, qui a eu la chance de monter à bord de la reconstitution virtuelle du navire, dans la salle Immersia(1), sur le campus de Beaulieu, à Rennes.

Les chercheurs entrent dans leur sujet

Grâce à cette salle et aux travaux de l’Irisa et du Conservatoire numérique du patrimoine archéologique de l’Ouest, les scientifiques peuvent véritablement entrer dans leur sujet, en trois dimensions « Dès la première expérimentation, en 2014, nous avons pu nous déplacer dans le navire que les infographistes et ingénieurs ont reconstitué à partir des plans et des données que nous leur avons fournis. » Dans le cadre du projet Asialog, l’équipe de Lorient du Centre de recherches historiques de l’Ouest(2) retrace l’histoire des navigations vers l’Asie, à travers l’étude des journaux de bord. Puis ont été ajoutés les canons, la possibilité de grimper dans la mâture et la voilure. « Cela permet d’apprécier les conditions de vie et de travail dans cet espace restreint : imaginez, il y avait cent trente personnes à bord, pendant cinq mois ! Sans compter les vivres, les tonneaux et surtout les caisses de porcelaine et les soieries, au retour. » Peu de navires de cette époque ont été reconstitués réellement. L’Hermione, frégate du 18e siècle qui a quitté Rochefort le 18 avril, pour les États-Unis, fait figure d’exception. La virtualisation est donc une chance. « Lorsque je me suis retrouvée à la barre, j’ai trouvé le navire étroit, la hauteur sous barreaux dans l’entrepont est réduite, j’étais presque pliée en deux », poursuit l’historienne.

La 3D s’est mise en mouvement

En travaillant sur la villa gallo-romaine du Bourg-Saint-Père (35), ou sur le cairn de l’île Carn (29)(3), les projets expérimentés dans Immersia étaient restés statiques. Avec le Boullongne, la 3D s’est mise en mouvement : l’objectif était de mettre le bateau en situation. Donc sur la mer. « C’était l’un des points techniques du projet, explique Ronan Gaugne, responsable technique de la plate-forme de réalité virtuelle Immersia, simuler la flottaison et suivre le mouvement de la mer. » L’autre défi à présent, c’est de faire rentrer tous les occupants de l’époque sur le navire : plus de cent marins qui se déplacent sont déjà à bord. Les autres passagers, mais aussi les 1200 poules, les bœufs, les cochons et les moutons arrivent. Les ingénieurs pourront aussi reconstituer l’univers sonore du voyage et pourquoi pas les odeurs !

Céline Duguey

(1) Lire “Des chercheurs en immersion totale” dans Sciences Ouest n° 298 - mai 2012.

(2) Laboratoire Cerhio. CNRS UMR 6258. (3)Lire Sciences Ouest n° 305 - janvier 2013.

Sylviane Llinares
Tél. 02 97 87 29 69
sylviane.llinares [at] univ-ubs.fr (sylviane[dot]llinares[at]univ-ubs[dot]fr)

TOUT LE DOSSIER

Abonnez-vous à la newsletter
du magazine Sciences Ouest

Suivez Sciences Ouest