Le sol, une plaque tournante

N° 337 - Publié le 21 mars 2017
VALERIE VIAUD/INRA

Magazine

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Élément clé du cycle de la vie, la matière organique a aussi un rôle central dans les interactions entre sol et atmosphère.

Présente tout autour de nous mais invisible en tant que telle, la matière organique des sols est un élément central des enjeux climatiques. Elle constitue un réservoir important de carbone qui peut être stocké pendant de nombreuses années en même temps qu’elle permet les flux de carbone et d’azote entre le sol et l’atmosphère, en lien avec le fonctionnement des organismes du sol. « La matière organique est une donnée intégratrice, elle est au carrefour des systèmes de production agricole et de l’environnement, explique Valérie Viaud, chercheuse au centre Inra (1) de Rennes et coordinatrice du projet Mosaic (2) à l’échelle nationale. À l’inverse, on peut se demander quels impacts vont avoir le changement climatique et les évolutions des systèmes de culture dans sa dynamique. » Dans quel type de sol est-elle le mieux stockée, par exemple ?

 

200 points de mesure sur 12 km2

Pour le savoir, les chercheurs sont allés faire des mesures sur le terrain, sur le site d’étude Agrhys (3), près de Pontivy, dans le Morbihan. Déjà connu des chercheurs, cet observatoire de 12 km2 a surtout été choisi pour son système agricole varié et représentatif : il comporte des élevages de porcs, de bovins, des exploitations en agriculture biologique... Les chercheurs ont organisé des prélèvements de sol et des mesures de teneur en carbone sur deux cents points disséminés sur tout le site. D’autres mesures de CO2 émis dans l’atmosphère ont été réalisées toutes les deux semaines pendant un an (du printemps 2014 au printemps 2015), sur cent emplacements, tandis que des prélèvements de sol ont été mis en incubation pendant cinq mois. « L’incubation en laboratoire nous permet de quantifier les phénomènes dans un environnement contrôlé où tous les paramètres sont connus, contrairement au terrain », explique Valérie Viaud.

La deuxième phase du projet a été de mettre en relation ces mesures avec les pratiques agricoles. Quel est l’apport d’engrais à cet endroit, comment le sol est-il travaillé ? Les réponses à ces questions ont été recueillies après rencontre des agriculteurs sur le terrain. Les enquêtes sont en cours de traitement. « Nous nous intéressons aussi au gradient d’humidité, poursuit Valérie Viaud. Le site comporte, par exemple, des fonds de vallée inondés l’hiver, contrairement aux crêtes alentour. Or, avec les changements climatiques, la répartition de ces zones d’excès en eau risque de changer. » La troisième et dernière phase du projet consistera à faire tourner le modèle avec toutes ces données. « Nous intégrerons aussi les mesures sur la matière organique dissoute, faites par nos collègues rennais de Géosciences », souligne-t-elle.

Au final, Mosaic ne regarde pas directement les effets du changement climatique, mais sera capable de donner une vision assez large de la dynamique de la matière organique, au niveau d’un territoire, et en même temps assez fine car capable de différencier les usages du sol. Cette vision systémique, en lien avec les pratiques agricoles, est une spécialité du laboratoire rennais.

Nathalie Blanc

(1) Dans l’UMR 1069 SAS : Sol, agro et hydrosystème, spatialisation.

(2) Mené de 2012 à 2016 avec le laboratoire Géosciences Rennes et deux unités Inra de Paris et Dijon, Mosaic fait suite au projet Landsoil. Lire Dialogue entre sol et climat dans Sciences Ouest n° 329-mars 2015.

(3) Ce site est un Observatoire de recherche en environnement (Ore), labellisé depuis 2002.

Valérie Viaud
02 23 48 51 42
valerie.viaud@rennes.inra.fr

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