Comment consommer moins ?

N° 339 - Publié le 25 août 2016
Fred Tanneau/AFP
Un chalutier de pêche de 25 m consomme en moyenne 10 t de gazole par semaine.

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Des PME locales proposent des solutions pour réduire la consommation en gazole des navires d’aujourd’hui.

Aujourd’hui, 20 à 40% du chiffre d’affaires d’une marée sert à payer le gazole consommé. Pour réduire cette facture énergétique, ingénieurs et chercheurs développent des innovations adaptées aux bateaux existants. Un gain tant économique qu’environnemental !

Qui consomme quoi ?

Pour maîtriser au mieux sa consommation, encore faut-il la connaître. Or, de la même manière qu’un automobiliste, un patron de pêche ne visualise que la quantité de carburant globale consommée par son navire. Sauf s’il est équipé d’un économètre analytique. « Grâce à des capteurs installés sur chaque engin consommateur d’énergie (arbre à hélice, treuil, pompe, chauffage...), notamment des pinces ampèremétriques, ce dispositif permet de savoir quel poste consomme quelle quantité de gazole », explique Pascal Citeau, dirigeant de Marinelec Technologies. Pour aller plus loin, l’entreprise quimpéroise développe actuellement l’économètre analytique intelligent Écomer dans le cadre du projet du chalutier Arpège mis à l’eau en septembre 2015. « Notre but est de développer un logiciel informatique capable, depuis l’ordinateur de bord, de comparer en temps réel les données de consommation entre elles, ainsi qu’aux données liées à l’environnement (vitesse du vent, du courant, état de la houle, position géographique du bateau...). » En fonction de ces analyses comparées et d’un seuil de consommation défini au préalable, plusieurs degrés d’action seront envisageables : 1) le logiciel de bord pourra stopper automatiquement les postes qui ne sont pas “critiques” comme le chauffage ; 2) il proposera au patron de pêche de couper des postes plus importants (ventilation, moteur...) tout en le laissant maître de la décision. « Écomer pourrait également permettre de vérifier le gain annoncé par l’installation d’un équipement, une nouvelle hélice, par exemple, ou encore de définir la route à emprunter pour assurer une consommation minimale. »

Une question de propulsion

Alors que l’on cherche à faire des économies d’énergie, les besoins en électricité, eux, ne cessent de croître que ce soit pour l’alimentation des treuils, des pompes, des ventilateurs ou des chambres froides. Et pour les satisfaire, une seule solution à ce jour : consommer plus de carburant ! Pour pallier ce problème, Barillec Marine a développé le concept VarShaft®. « VarShaft® peut être installé sur des bateaux neufs ou déjà en activité, il permet de réduire la consommation de carburant des moteurs diesel tout en assurant la propulsion du bateau et une production électrique constante, même à faible vitesse de rotation du moteur (700 tours/min) », annonce Maurice Buttet, chef de l’entreprise basée à Concarneau, ajoutant que ce concept a émergé lorsqu’ils travaillaient sur La Frégate III. « Nous avions alors observé que la consommation était moindre lorsqu’on faisait tourner le moteur à vitesse variable plutôt qu’à vitesse fixe ». Or, la grande majorité des chalutiers actuels sont propulsés avec un moteur tournant à vitesse fixe. « Tout en faisant varier la vitesse de rotation du moteur et en installant un convertisseur et une génératrice adaptés, nous sommes parvenus à produire un courant alternatif à tension (230 V) et fréquence (50 Hz) fixes permettant d’alimenter les engins électriques à bord. » Si chaque composant de VarShaft® a été testé et approuvé, l’ensemble du concept sera soumis à un banc d’essais dans le courant de l’année.

Exit algues et balanes !

Autre sujet d’amélioration : la coque. Quand on sait qu’une épaisseur de 1 ou 2 mm d’algues et d’organismes fixés sur la partie immergée d’un bateau suffit à réduire sa vitesse d’environ 15%, on mesure tout l’intérêt d’utiliser une peinture antisalissure (antifouling) efficace. Bien qu’il existe des antifouling à base de silicone(1), « les plus utilisés aujourd’hui restent ceux contenant des biocides », annonce Isabelle Linossier, directrice adjointe du Laboratoire de biotechnologie et chimie marines de l’Université de Bretagne Sud. L’utilisation de ces substances toxiques (pesticides, herbicides ou du cuivre) étant désormais très réglementée(2), « notre équipe teste différents dosages et mélanges de biocides autorisés afin de limiter leur caractère polluant tout en préservant leur efficacité. » Dans le cadre du projet BioPainTrop, elle s’intéresse également, depuis 2012, au potentiel antifouling de molécules sécrétées par des microalgues provenant de La Réunion. « Une fois que nous aurons identifié les molécules actives qui permettent à ces algues de ne pas être colonisées, nous pourrons alors les synthétiser et formuler ainsi des peintures efficaces et biodégradables. »

Julie Danet

(1) Ces antifouling ont l’avantage de ne contenir aucun biocide (pesticides, herbicides ou du cuivre), mais pour être efficaces, il faut que le bateau navigue régulièrement. C’est en effet la faible énergie de surface de ces matériaux qui permet de limiter l’adhésion des organismes qui se décrochent sous la force hydrodynamique de l’avancée du bateau.

(2) Directive européenne “biocides” n° 98/8.

Pascal Citeau
tél. 02 98 52 16 44
marinelec@marinelec.com

Maurice Buttet
tél. 02 98 50 12 07
mbuttet@barillec.fr

Isabelle Linossier
tél. 02 97 87 46 81
isabelle.linossier@univ-ubs.fr

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