Des petits bébés sous haute surveillance

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N° 345 - Publié le 18 octobre 2016
Exemple de suivi par caméra vidéo (gauche) et par imagerie thermique (droite). Cette dernière permet de repérer les moments où le personnel soignant intervient (ajout d’une autre forme, type bras des puéricultrices, à haute température) ce qui perturbe l’analyse de la vidéo noir et blanc classique.

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Des chercheurs rennais pilotent l’élaboration d’une station de surveillance automatisée des grands prématurés.

À Rennes, cent vingt bébés naissent chaque année avant six mois de grossesse. Ces très grands prématurés sont fragiles. Ils doivent terminer leur maturation hors du ventre de leur maman et leur système immunitaire n’est pas complètement opérationnel. Pendant leur séjour à l’hôpital, 15 à 20 % d’entre eux contractent des infections bactériennes qui peuvent rapidement se généraliser et être fatales. « Il faudrait pouvoir faire un diagnostic plus précoce de ces maladies et aussi avoir des outils de surveillance moins invasifs », note Patrick Pladys. Le chef du service de pédiatrie du CHU de Rennes est également chercheur au Laboratoire traitement du signal et de l’image (LTSI) à l’Université de Rennes 1. Depuis mars dernier, il coordonne, avec Guy Carrault, le directeur adjoint du LTSI, le projet européen DigiNewB(1), dont la finalité est la conception d’un système de surveillance automatisé des prématurés qui aiderait le personnel soignant à détecter les infections.

La preuve du concept

Cela fait plus de dix ans que ces spécialistes du traitement du signal triturent les données médicales, et notamment celles utilisées couramment dans les services de pédiatrie : signaux de la saturation en oxygène, électrocardiographiques, respiratoires... pour sélectionner et extraire les plus pertinents. « La variabilité respiratoire et la variabilité cardiaque sont de très bons indicateurs pour apprécier le risque d’infection. Nous en avons fait la preuve(2) », précise Guy Carrault. Les chercheurs testent aussi l’intérêt de nouvelles données, comme l’analyse de films vidéo.

Filmer le sommeil

« Dans le projet, nous travaillons aussi sur le suivi de la maturation des bébés. Ce paramètre conditionne leur sortie de l’hôpital et nous ne disposons pas aujourd’hui de données objectives pour le quantifier, ajoute Patrick Pladys. Or filmer peut être très intéressant pour surveiller le sommeil, qui est une période très importante dans la maturation du système neuronal. Mais les capteurs de surveillance actuels sont très invasifs : sur la tête (électroencéphalogramme), dans le nez (mesure du flux nasal), autour du thorax (mesure de la respiration). »

« Pour l’instant, nous avons fait des tests de caméra, de cadrage, pour bien apprécier l’état des yeux du bébé et ses mouvements, et vérifier que son emplacement ne gêne pas le personnel soignant, précise Guy Carrault. Mais en termes de traitement du signal, il reste beaucoup à faire. » Tout comme avec les deux autres appareils que les chercheurs comptent tester : un enregistreur des sons émis par les bébés(3) et une caméra thermique.

Dans les CHU de l’Ouest

Une fois le type de données choisi, les Rennais et leurs partenaires européens travaillent sur leur exploitation (hiérarchisation, croisement des résultats...) et notamment sur leur représentation visuelle : car au final, ce sont des médecins et des infirmières qui utiliseront la station de surveillance. D’ici quatre ans, entre quinze et vingt appareils seront répartis dans le réseau des CHU du grand Ouest, autre partenaire du projet. Une base de données cliniques sera aussi constituée à partir du suivi de 700 à 1000 petits patients dans les CHU de Brest, Rennes, Angers, Nantes, Poitiers et Tours(4). Silence, on tourne !

Nathalie Blanc

(1) Projet Personalizing Health Care 30 lancé dans le cadre de l’appel à projets H2020.
(2) Résultats publiés en 2009 (variabilité cardiaque) et 2012 (variabilité respiratoire).
(3) Avec la filiale santé de la société lannionnaise Voxygen ; lire La nouvelle voix des machines dans Sciences Ouest n° 310-juin 2013.
(4) Du Groupement de coopération sanitaire des CHU du grand Ouest.

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