Des vers invasifs en Bretagne

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N° 364 - Publié le 11 septembre 2018
Pierre Gros.
Le ver plat Obama nungara (au second plan) est présent dans la région. Il se nourrit de vers de terre.

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Originaires d’Australie ou d’Asie, des vers prédateurs colonisent les jardins.

Trois espèces de vers plats terrestres envahissants ont été observées en Bretagne. Elles figurent parmi la dizaine d’espèces découvertes en France. Ces espèces (plathelminthes) viennent d’Australie, d’Asie ou d’Amérique du Sud. Occupant les pots de fleurs, ces vers sont arrivés en Europe avec des plantes. Ils se retrouvent aujourd’hui en grande quantité dans les jardins. Prédatrices de la faune du sol, ces espèces affectent la biodiversité locale. Jean-Lou Justine, professeur au Muséum national d’histoire naturelle et spécialiste des plathelminthes, vient d’y consacrer un article(1).

Signalements à Quimper

Le plathelminthe Parakontikia ventrolineata est très abondant dans notre région.

« À Quimper, cette espèce a fait l’objet de plusieurs dizaines de signalements, explique Jean-Lou Justine. Les habitants les découvrent agglutinés autour d’un ver de terre ou d’un escargot mort. » Ces vers plats sont aussi retrouvés dans les trous de fruits, formés par les limaces. Cette espèce prolifère rapidement.

Parmi les deux autres espèces observées en Bretagne, celle surnommée “rayée jaune”, en raison de la bande sur son dos, est prédatrice d’arthropodes. Elle se nourrit de mille-pattes et de cloportes. L’espèce Obama nungara (photo) est un ver plat marron très présent dans la région, où il consomme les vers de terre. Ces trois espèces mesurent 5 cm en moyenne. Dans d’autres régions, des vers plats géants (Bipalium et Diversibipalium) ont été observés. Venus d’Asie, ils peuvent atteindre 40 cm de long, avec une tête en forme de marteau. Prédatrices de vers de terre, ces espèces mangent de grandes proies, grâce au neurotoxique qu’elles produisent. « Un signalement récent provient des Deux-Sèvres, précise le chercheur. En Bretagne, nous n’en avons pas encore trouvé. Cela ne signifie pas qu’il n’y en a pas. »

700 témoignages en France

La découverte en 2013 d’un “ver bizarre” par le photographe amateur Pierre Gros a alerté les scientifiques. Après plusieurs observations dans différentes régions, le muséum a lancé une enquête nationale, coordonnée par Jean-Lou Justine. Résultats : plus de 700 témoignages montrent la grande répartition géographique des plathelminthes. Les données recueillies remontent à 1999, grâce à des photos et vidéos. « Mon travail est de nommer ces vers, de déterminer leurs caractéristiques et de cartographier leur distribution », résume le spécialiste.

Quels sont les effets sur leurs proies et sur les écosystèmes ? C’est la grande question aujourd’hui. « Des expériences en laboratoire sont nécessaires pour étudier la dispersion et le comportement de ces prédateurs », complète le biologiste Daniel Cluzeau, responsable de l’OPVT(2) à la Station biologique de Paimpont. « Nous n’avons pas encore lancé un tel projet de recherche, par manque de réactivité des instances de décisions. » À suivre.

Marion Guillaumin

(1) Ces observations ont été recensées et publiées dans PeerJ, mai 2018.
(2) Observatoire participatif des vers de terre, porté par l’Université de Rennes 1 (Osur - Écobio).

Jean-Lou Justine, jean-lou.justine@mnhn.fr
Daniel Cluzeau, tél. 02 99 61 81 80, daniel.cluzeau@univ-rennes1.fr

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